Charlotte Bousquet - Là où tombent les anges

Solange, dix-sept ans, court les bals parisiens en compagnie de Clémence et Lili. Naïve, la tête pleine de rêve, elle se laisse séduire par Robert Maximilien et accepte de l’épouser. Mais son prince est un tyran jaloux, qui ne la sort que pour l’exhiber lors de dîners mondains.

Coincée entre Robert et Emma, sa vieille tante aigrie, Solange étouffe à petit feu. Heureusement Lili la délurée et la douce Clémence sont là pour la soutenir. Quand la première guerre mondiale éclate, Robert est envoyé sur le front.

C’est l’occasion pour Solange de s’affranchir de la domination de son mari et de commencer enfin à vivre, dans une ville où les femmes s’organisent peu à peu sans les hommes…

 

Mon avis: 

 

Sans même avoir lu le résumé de ce roman, j'ai eu envie de le découvrir, tout simplement parce que je trouve le titre extrêmement poétique. Je me suis dis que si le titre est beau, le roman devait l'être, non ? 

 

Toutefois, je ne m'attendais pas du tout à un roman dont l'histoire se déroule pendant la Première Guerre Mondiale. Pour le coup, je trouve le contraste saisissant entre la beauté du titre et la violence de la guerre; l'antagonisme est à son paroxysme ! 

 

Solange quitte sa campagne pour la capitale. Avec son amie Lili, elles se sentent prêtes à conquérir le monde, s'affranchir de l'autorité parentale. Mais si Lili est vive, croque la vie à pleine dent et saisit chaque occasion, Solange demeure en retrait, comme figée dans la retenue perpétuelle de devoir s'exposer au monde. Elle connaît l'amour, le perd, puis rencontre son futur mari qui, rapidement, se montrera d'une jalousie extrême et violente. La guerre l'expédie loin d'elle, mais Solange doit continuer à vivre. Elle noue des amitiés, commence à s'émanciper, découvre de nouvelles passions, se remet en question, et voit le monde changer, jusqu'à parfois s'écrouler, autour d'elle. 

 

L'histoire, en elle-même, n'est pas rocambolesque. Ne vous attendez pas à des rebondissements à vous tenir en haleine, pas du tout. Nous sommes dans une pure narration de faits et d'Histoire. Avec le grand H car il s'agit de la guerre. En soi, cela n'est pas perturbant, finalement, le récit se trouve ainsi proche de la réalité et ne propose pas de faits dont il serait aisé de remettre la crédibilité en doute. En restant le plus proche possible du réel, l'autrice nous plonge davantage dans cette période sombre. 

 

"Lorsqu'elle est là, je la fuis. Quand elle n'est pas là, je la guette. Elle me met mal à l'aise, m'attire et s'amuse de ma gêne."

 

Solange m'a séduite même si parfois, j'avais envie de la secouer. Elle subit beaucoup et semble prendre cela pour acquis; selon elle, elle le mériterait. Absolument pas. Et je trouve dommage qu'elle ne se soit pas rebellée plus tôt. Mais avec le recul, je me dis que son acte ultime est arrivé à point nommé, mûri par des années de souffrance. Plus tôt, cela aurait été trop évident. Non, là, elle construit son bout de chemin en côtoyant la jet set parisienne. La voir évoluer de salon en salon, rencontrer ceux qui lui feront confiance, ceux qui l'influenceront dans ses décisions, j'ai trouvé cela très plaisant à lire. Lili, son amie de toujours, est son contraire. Elle est pétillante, prend le bateau pour explorer un nouveau pays, ... malgré leurs différences, Lili et Solange sont indissociables et inséparables (même si ça ne plaît pas à tout le monde). En opposant deux personnalités au sein de son histoire, l'autrice a mis en évidence deux façon différentes de percevoir le conflit et donc, de le gérer. Sans oublier Clémence, Marthe, Blanche, Olga, ... 

 

Roman très féministe puisqu'il donne la place d'honneur aux femmes, les hommes ont toutefois une belle place. Peu présents, je vous l'accorde, il n'en demeure pas moins que grâce aux lettres de Pierre, nous vivons la guerre en même temps que nos héroïnes. Robert, le mari de Solange, tient lui aussi une place à part et son retour marque les esprits. L'autrice en profite pour pointer la différence entre le devoir et l'amour. 

 

L'histoire se déroulant pendant la Première Guerre Mondiale - et le conflit prenant une grande place - il n'était pas possible de faire l'impasse sur des faits historiques. En cela, je félicite l'autrice qui nous en a livré des bribes sans alourdir son récit. Des extraits de journaux, des faits, le tout imbriqué dans l'histoire. Car oui, certaines de ces femmes vont se retrouver au cœur de certains évènements avérés. Je n'oublie pas de vous parler de la plume de Charlotte Bousquet qui est très agréable, fluide, toute en douceur.  

 

Malheureusement, ce roman n'a pas été le coup de cœur que j'espérais. Comme quoi, il ne faut pas trop en attendre d'un simple titre ! Toutefois, j'ai trouvé qu'il était bon car il donne à la femme une place centrale en montrant son évolution: de femme au foyer, elle devient employée d'une usine d'armement pour faire vivre la nation. En quatre cents pages, nous voyons l'évolution de la femme et les révoltes qui ont accompagnées cette révolution. Et l'autrice montre à merveille cette révolution au travers de chacune de ses héroïnes qui ont toutes un caractère et un idéal différent. 

 

Alors oui, me direz-vous, je parlais d'une certaine linéarité dans l'histoire, mais ce récit est rythmé par les lettres que s'échangent les protagonistes (les hommes au front qui écrivent à leurs femmes, par exemple) mais aussi par les extraits du journal intime de Solange, journal dans lequel elle couche tous ses sentiments. Finalement, cela convient pour cette histoire qui n'en demandait pas plus, les deux sujets principaux - à savoir l'évolution de la femme et la guerre - se suffisent à eux-mêmes pour attiser la curiosité et donner envie de le lire. 

 

Note: 15/20

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Commentaires: 2
  • #1

    Sorbet-Kiwi (mardi, 09 avril 2024 11:17)

    Ce roman m'attend dans ma PAL depuis des années, ton avis est plutôt motivant même si cela n'a pas été un coup de cœur :)

  • #2

    Les Mots de Gwen (mardi, 09 avril 2024 11:21)

    Pas un coup de cœur mais une lecture agréable, les thèmes abordés sont intéressants. C'est ce qui le sauve !