Maélia aime son amoureux à la folie. C'est le premier, la bonne personne, l'homme de sa vie. Mais lorsqu'elle quitte sa région éloignée pour le cégep, elle découvre le monde sous des angles imprévus.

Et si Oli ne voulait pas vraiment son bonheur ? Maélia comprend surtout que sa vie peut prendre de l'expansion. Jusqu'à ce que ça fasse bang.

Une incursion dans l'univers des relations toxiques, qui dévoile l'ampleur du piège mais aussi les voies possibles de la liberté.

 

Mon avis: 

 

Avant de vous présenter ce roman, sachez qu'il aborde des thèmes forts comme la violence conjugale, la pression psychologique ou le viol.

 

Ce roman, c'est Maélia qui nous raconte son histoire, sous forme d'une lettre qu'elle rédige à destination de son petit ami, Oli. Toutefois, même s'il s'agit d'une lettre, il n'y a pas de forme épistolaire, cette lettre est rédigée comme un roman, avec des chapitres. J'aurais tendance à la qualifier de journal intime. Maélia nous raconte donc sa vie, sur une année - grosso modo - une vie qu'elle décortique au fur et à mesure, aussi bien sa vie étudiante qu'amoureuse. Et c'est sur cette dernière qu'il convient de s'attarder. 

 

A première vue, amour parfait. Oli et Maélia sont jeunes (17 ans), ils vivent une histoire parfaite, les parents de Maélia adorent Oli (ils lui offrent un travail et un toit), Oli encourage Maélia à poursuivre son rêve,... non vraiment, histoire parfaite. Maélia peut aussi compter sur ses deux meilleurs amis: Mathilde et Martin (lui même en couple avec un homme). 

 

"Tu m'as embrassée sur les lèvres et t'es sorti, en laissant derrière toi un vide qui menaçait de m'engouffrer vivante."

 

Au fil des pages, Maélia met le doigt sur quelque chose et l'explore au fur et à mesure que les jours passent. Elle réalise que son histoire parfaite ne l'est que de surface. Si l'on creuse, on découvre une étoile qui se meurt. 

 

"Si tes traits avaient pu parler, je suis sûre qu'ils m'auraient traitée de conne."

 

J'ai beaucoup aimé la façon dont Alexandra Larochelle a amené les doutes de Maélia. Nous, en tant que lecteurs, on perçoit le malaise, l'attitude d'Oli, mais pas Maélia qui se remet d'abord en cause. Elle culpabilise de s'exprimer, de ressentir, de vouloir dire non. Car Oli retourne la situation à son avantage et la fait se sentir coupable. C'est distillé avec justesse: il se braque puis se radoucit, lui reproche d'être égoïste, refuse de l'écouter, se fiche de son état émotionnel, la contraint. Tout est parfaitement maîtrisé par l'auteur pour faire monter la toxicité à son paroxysme, ce moment où Maélia réalise qu'elle se meurt dans cette relation. 

 

"T'as raison, comme l'abracadabra de ton amour pour moi."

 

En parallèle, nous prenons connaissance d'une autre forme de violence: la violence physique. En effet, le meilleur ami de Maélia est battu par son petit ami. Ce parallèle, entre la violence physique qui se voit, et la violence psychologique que subit Maélia - qui est sournoise, voire insidieuse puisqu'elle joue sur son mental - est extrêmement intéressant car il met en avant toutes les formes de violence et prouve que celle-ci n'a pas besoin d'être visible pour être vécue. 

 

"C'était clairement l'angoisse qui parlait et l'angoisse n'est rien d'autre qu'une conne irrationnelle."

 

L'auteur a construit de bons personnages. Oli, pour commencer, nous séduit dès le départ. Doux, attentionné, il est le petit ami idéal. Puis, petit à petit, ses réflexions, sa médisance, son mépris, prennent de plus en plus de place. Aucun coup, rien, tout est dans les mots et l'attitude. Face à lui, Maélia est tout aussi douce mais fragile émotionnellement et Oli exploite cette faille pour assouvir sa domination mentale. A cela s'ajoute les désagréments que vit Maélia lors de son arrivée dans son appartement. J'ai beaucoup aimé ce personnage féminin, sa force pour ne pas se laisser abattre face aux aléas de la vie, et sa faiblesse sentimentale - pour ne pas dire son aveuglement - qui la plonge dans un abîme de réflexions. Martin, même s'il sert de pilier pour exploiter la violence physique, n'est que peu exploré, ses apparitions se comptant sur les doigts d'une main. Malgré tout, en quelques apparitions, l'auteur nous dépeint ce garçon amoureux et prêt à trouver des excuses pour justifier les coups de son petit ami. 

 

Si la violence est le thème majeur, Alexandre Larochelle aborde aussi la notion de genre et s'inscrit dès lors dans l'actualité. 

 

"Je sentais que la Maélia d'avant avait commencé à disparaître le jour où notre amour était apparu; j'avais l'impression qu'elle s'était fondue quelque part en toi et qu'elle s'effaçait au fur et à mesure que tu la digérais."

 

C'est un roman à la construction parfaite que je vous conseille de découvrir. Il s'adresse à tout le monde, que l'on soit un adolescent ou un adulte. Il explore les chemins d'une relation toxique, la façon dont le venin se répand et consume la personne qui s'éteint petit à petit jusqu'à la révélation. Il aborde aussi le déni amoureux, on aime, on pardonne, on justifie. Seulement, rien ne peut justifier le manque de respect, et la prise de conscience peut-être douloureuse. 

 

Petit mot de la fin... je pense très fortement que ce roman aura une suite et soyez sûrs que je vais la guetter! 

 

Note: 17/20